Sous ses différentes formes, la relation à l’autre fonde et travaille, depuis toujours tout ou partie des sociétés humaines. De connaissance, de méconnaissance ou d’inconnaissance, cette relation n’est pas à penser comme un tiers-être entre l’Un et l’Autre. Elle est bien plutôt ce qui, en deçà et au-delà de toute onticité, donne à être et l’Un et l’Autre ; mais elle n’a jamais été aussi problématique que depuis que les sociétés les plus distantes les unes des autres, sont en relation directe ou indirecte, que depuis que ce qui s’appelle "le village planétaire" tente, dans le discours au moins, de raboter les différences, niveler les cultures, standardiser les modèles de consommation, limer les aspérités, épurer la planète des doutes et des incertitudes devant la progression de l’économie-monde. Celle-ci, d’ailleurs, n’a de cesse, par un effet de perversion, de "marchandiser" la différence, c’est à dire la relation même à l’Autre. Ce mouvement tente donc de jouer sur deux tableaux contradictoires : dans le même temps qu’il pousse à l’uniformisation, il encourage la différenciation et la démassification, dont il évacue le sens pour n’en garder que les signifiants.